Que
les indiscrétions se terrent. Que Sarah Abitbol et Stéphane
Bernadis, qui effectueront leur rentrée cette semaine
à Gelsenkirchen, à l'occasion de la troisième étape allemande
du Grand Prix, en profitent pour changer l'intitulé de
leur programme libre. S'ils ont choisi une composition
musicale originale, les médaillés de bronze des derniers
Championnats du monde à Nice devraient aussi oublier leur
désir de transposer la légende de Tristan et Iseult. Parce
qu'au jeu des comparaisons, les Français risqueraient
de souffrir face à la variation des Canadiens Jamie Sale
et David Pelletier.
Retracé
par l'opéra de Wagner, le mythe des amants éternels ne
pouvait imaginer meilleurs interprètes. C'est en tous
cas la conclusion des Skate America et Canada, qu'ils
viennent successivement de remporter. Révélation de la
saison dernière, le duo canadien avait échoué au pied
du podium mondial après trois erreurs inhabituelles de
Jamie. Mais il avait surtout touché le cœur du public
avec sa version facétieuse et romantique de l'indémodable
Love Story. Au-delà de leur travail personnel, du synchronisme
partait des sauts ou des pirouettes, Sale-Pelletier avaient
su jouer sur l'expression, sur les regards. Une orientation
qui dépasse le côté passionnel qu'avait apporté les merveilleux
Gordeeva-Grinkov, même si l'image de ces derniers reste
inaltérable. A Mississauga, les observateurs ont très
vite compris que deux couples allaient se dégager. Ici
et tout au long de la saison. Pour entraver la glisse
triomphale de Sale-Pelletier vers un premier titre mondial
à domicile, lors des prochains Mondiaux de Vancouver (mi-mars),
il faut effectivement compter avec les Russes Berezhnaïa-Sikharulidze,
doubles champions du monde (1998 et 1999), mais déchus
de leur titre européen et absent de Nice après l'annonce
d'un contrôle antidopage positif d'Elena qui prétexta
une mauvaise grippe.
Eblouissants
dans le programme technique de jeudi, les deux couples
menaient les débats avant le libre de vendredi soir. Premiers
en lice, mais deuxièmes du classement provisoire, les
Canadiens Sale-Pelletier allaient soulever l'âme des quelque
15 000 personnes présentes dans les gradins, avant d'être
salués par une des rares standing ovation. Si ce n'est
un axel simplifié par Jamie, le programme imaginé par
Lori Nichol a frôlé la perfection. Et l'émotion qu'il
dégage est si intense, qu'il réconcilierait n'importe
quel sceptique avec le patinage.
Nul
doute que les Russes réaliseraient le même exploit. Mais
dans un style très différent, sur des musiques des films
de Charlie Chaplin. Et si une chute d'Elena dans le triple
salchow lancé les a privés de la victoire au Canada, les
élèves de Tamara Moskvina ont de gros arguments pour que
le duel annoncé avec les Canadiens Sale-Pelletier tournent
à l'avantage... d'une catégorie, les couples, qui ne pourra
que se nourrir d'une telle rivalité dans l'excellence.
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C. N.
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